Ils avaient beau être mal-aimés, craints ou poursuivis, les pirates avaient pour eux un sentiment bien plus fort de leur côté : l’admiration, celle des petites gens, des hommes aux vies étriquées rêvant à un peu de liberté… Autant dire, un grand nombre de gens. Et malgré l’interdiction visant la piraterie, une sorte d’économie parallèle ne mettait jamais beaucoup de temps à se construire autour d’eux attirant toutes sortes de profiteurs avides d’or et de gloire. Parmi eux se trouvaient en bonne place les prostituées, des femmes relativement passables dont l’éducation frisait le néant mais qui savait s’y prendre avec les hommes. Le portrait de ces femmes n’est certes pas flatteur mais Mercedes savait de quoi elle parlait malheureusement. Ne vous fourvoyez pas, elle est loin d’en être une mais être élevée, ou tout du moins ce qui s’en approche, dans une maison close permet d’acquérir certaines connaissances pas vraiment indispensables à la vie…

Sofia, la mère de Mercedes, était une jolie fille mais elle eut le malheur de rencontrer les mauvais hommes au mauvais moment et au final, elle se retrouva sans vraiment comprendre pourquoi dans ce bourbier à gagner sa vie de façon quelque peu honteuse. Chaque homme était sensé être le dernier, jusqu’à ce qu’elle apprenne sa grossesse et que gagner de l’argent n’était plus un plus mais une nécessité. Bien sûr, Sofia n’eut jamais de certitudes sur l’identité du père de son enfant mais elle se fit rapidement une raison : rare étaient les hommes qu’elle avait connu qui auraient pu prétendre à une paternité. Quand Mercedes vint au monde, elle fut élevée par sa mère et ses ‘collègues’ dans ce qui leur servait de piaules. Une enfance pour le moins originale qui lui enseigna la débrouillardise. Très libre, elle fit son apprentissage de la vie seule, entouré de poivrots et femmes sans vertus. Pourtant, elle se fit facilement à cet environnement, arrivant avec une extrême facilité à vivre sa vie sans se soucier des autres.

Sa mère, bien que peu présente, arriva tout de même à faire en sorte que sa fille n’ait pas cette vie médiocre et grâce à quelques relations, elle réussit à la faire intégrer une école dans un village voisin. Très intelligente, elle se fit rapidement remarquée par un haut dignitaire de la région qui l’engagea en tant que femme de maison. C’est ainsi qu’elle réussit à se sortir de son trou pourri tout en gardant son semblant de vie. Une vie qu’elle passe à présent entre cette maison bourgeoise et son village encrassé où les pirates passent de temps à autres. Une vie simple qui ne lui prend pas la tête et où sa fraîcheur fait déjà des ravages sur les jeunes matelots mais ne vous réjouissez pas, cette fille là est une solitaire, une vagabonde qui déteste les entraves alors elle n'est pas prête de se faire passer la bague au doigt!